Retail Park

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Marqué par la crise sanitaire et les nouvelles habitudes de consommation – le e-commerce d’un côté, la proximité de l’autre –, le secteur du commerce voit un segment bien résister : celui des retail parks. Ce secteur s’est même taillé la part du lion à l’investissement en 2021, avec 1,1 Md€ transactés. La clé du succès de ces parcs d’activités commerciales ? Moins de charges pour les enseignes car peu de parties communes, des surfaces individuelles plus faciles à opérer en période de pandémie ou encore une bonne accessibilité.

Qui l’aurait cru ? Après des années de retail bashing et une crise sanitaire sans précédent, en 2021, le commerce de périphérie s’est retrouvé sous les feux des projecteurs des investisseurs. Et s’il est un produit qui a bénéficié d’investissements records, c’est bien le retail park. Pour la première fois depuis 2008, avec 1,1 Md€ échangés, les parcs d’activités commerciales coiffent au poteau, les centres commerciaux et pieds d’immeubles. « Cette première place est due au fort dynamisme de la périphérie des villes depuis le début de la pandémie de Covid-19 et les nombreux actifs adressés au marché », observe Laurent de Sayve, associé fondateur d’ImocomPartners, société de gestion dédiée à 100% aux retail parks, pour le compte d’investisseurs institutionnels.

Le retail park, une place de village

Avant de décortiquer les clés du succès du retail park, commençons par le définir.
« C’est un ensemble commercial à ciel ouvert qui comprend au minimum cinq unités locatives pour une surface supérieure à 3000 mètres carrés, un parcours client soigné (parkings, espaces verts, cheminements piétons…) et des charges communes peu élevées pour les enseignes », résume Alexandre Séjourné, Directeur général d’Accessite, filiale de Nexity qui gère, pour le compte de tiers, plus de 300 actifs de commerce. Selon Laurent de Sayve, « ces retail parks, le plus souvent situés à proximité de zones pavillonnaires, peuvent être assimilés à une place de village qui réunit des commerces de proximité », ajoute Laurent de Sayve. Importé des États-Unis au début des années 1990, le concept de retail park ambitionne de transformer les entrées de villes françaises – parfois trop enclines à la désorganisation en matière d’urbanisme. « Au fur et à mesure, ces espaces commerciaux à ciel ouvert, inspirés entre autres par les outlets, ont opéré une montée en gamme pour devenir des lieux de destination à part entière », poursuit le Directeur général d’Accessite. De quoi donner un nouveau visage aux zones d’activités commerciales dites ‘‘sans âme’’ où s’enchaînent des boîtes en bardage métallique entourées de parkings.

Évolution immobilière des enseignes

Le retail park répond à « trois besoins pour trois acteurs différents » relate Alexandre Séjourné. D’abord, il vient satisfaire une clientèle en recherche de produits de qualité à prix attractifs, sans verser dans le haut-de-gamme. « Le retail park, avec ses enseignes à petits prix et ses parkings gratuits, séduisent une clientèle de plus en plus contrainte dans ses dépenses obligatoires », complète Laurent de Sayve. Ensuite, ce produit répond pleinement à l’évolution immobilière des enseignes.

« Face à des loyers et des charges communes parfois trop élevées en centre-ville et dans les centres commerciaux, c’est un modèle dans l’ère du temps garantissant une équation économique intéressante pour les enseignes », abonde le Directeur général d’Accessite. Effectivement, aux côtés des ténors du retail park – géants du meuble et de l’électroménager, marques discounts… – des enseignes comme H&M, Maison du Monde, Celio ou Jennifer s’y déploient. Sans oublier les offres de restauration et de loisirs qui s’y développent à vitesse grand V. Enfin, cet objet immobilier permet aux collectivités locales de soigner leurs entrées de villes. « La déconvenue essuyée par le projet du groupe Frey à Montpellier, abandonné à la suite d’un revirement de la mairie, « était le meilleur exemple de ces dernières années car il portait des synergies urbaines fortes », estime Alexandre Séjourné. À ces trois caractéristiques phares, l’associé fondateur d’ImocomPartners, qui détient 30 retail parks en portefeuille pour plus de 600 M€, ajoute trois critères d’implantation. « Nous investissons dans des zones de chalandises bien desservies qui recensent, au minimum, 150 000 habitants ; à proximité d’une zone pavillonnaire et de locomotives alimentaires, de bricolage ou discount. »

Format anti-crise

Le succès des retail parks ne s’est pas démenti avec l’épidémie de Covid-19. Au contraire… Ils se sont révélés être « un format anti-crise », exprime le Directeur général d’Accessite. Ces parcs d’activités périphériques ont bénéficié des avantages d’une configuration ouverte sur l’extérieur, d’un large panel de surfaces disponibles, d’enseignes solvables, de facilités de stationnement et de coûts d’exploitation encore maîtrisés. « Le modèle des retail parks nouvelle génération fait consensus tant auprès des enseignes que de la clientèle », relève Cushman & Wakefield dans une récente étude. « Mis à part le premier confinement, poursuit Laurent de Sayve, les retail parks sont restés ouverts et ont bénéficié de jauges moins contraignantes à l’inverse des centre-commerciaux. Par ailleurs, ils se sont révélés être le modèle idéal pour le click and collect et le drive. » En outre, chez ImocomPartners, l’effet rebond lors des déconfinements en 2020 a été très fort, avec des fréquentations supérieures de 25 % par rapport à la période avant Covid. Mis bout à bout, ces avantages – face à un modèle du centre-commercial en difficulté – ont convaincu les investisseurs que le retail park était le nouvel eldorado à l’acquisition. À titre d’exemple, Altarea a cédé 49 % d’un portefeuille de neuf retail parks à Crédit Agricole Assurances pour quelque 600 M€ quand BNP Paribas REIM a signé les 37 000 mètres carrés d’Alpha Park II aux Clayes-sous-Bois. De son côté, ImocomPartners a acquis, fin 2020, le retail park Cap Sud en périphérie de Tours pour 11,6 M€. Puis, début 2021, Laurent de Sayve et son associé, Bruno de Scorbiac, annoncent la fusion de leurs trois fonds pour créer ImocomPark – soit le plus important OPPCI dédié à cette classe d’actif dans l’Hexagone. « En rythme de croisière, nous sommes prêts à investir, de manière très sélective, entre 100 et 150 M€ par an sur les trois prochaines années », annonce Laurent de Sayve.

Adapter les mètres carrés existants

Au-delà de ces solides fondamentaux, quelles sont les perspectives pour le produit retail park ? « Ce marché continuera à être actif ces prochaines années, répond Alexandre Séjourné. Une vingtaine de projets de grande envergure (+ 40 000 m²) sont à l’étude ou en travaux avec une ouverture prévue d’ici 2023, et devraient alimenter la production de mètres carrés commerciaux sous ce format dans les cinq prochaines années. » Pour se conformer au moratoire sur les zones commerciales en périphéries des villes, Laurent de Sayve invite les pouvoir publics à « simplifier » la vie de ceux qui veulent réhabiliter des retail parks vieillissants. Une bonne manière de reconstruire la ville sur la ville. Une idée partagée par Alexandre Séjourné, pour qui « la réalisation de nouveaux équipements sera moins tournée sur la seule création de mètres carrés supplémentaires que sur l’adaptation des mètres carrés existants. » Une problématique qui par ailleurs touche l’ensemble de l’immobilier de commerce… Face à l’avènement de retail parks nouvelle génération, le Directeur général d’Accessite estime que l’évolution des lieux de commerce passera par « la mixité des usages avec une approche nouvelle des valeurs locatives ». Sans oublier, bien-sûr, de miser sur l’omnicanalité. « Plus que jamais la jonction entre le retail physique et l’online demeure d’actualité et arrive plus vite que prévu suite à la crise sanitaire », parachève-t-il.

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