Pourquoi les hôtels en régions ont de l’avenir

Pascal Savary : Elle est meilleure qu’en région parisienne. Cette dernière a souffert de l’absence des clientèles internationales et d’affaires. En régions, la montagne et le littoral ont plutôt bien fonctionné : les chiffres de cet hiver et du mois de février sont à des niveaux équivalents à ceux de 2019 qui étaient exceptionnels. Cette dynamique s’explique par l’envie des citoyens de retrouver une vie normale.

Carlo Tamanini : Nos clients hôteliers nous ont indiqué que leurs établissements moyenne gamme, c’est-à-dire les 2-3 étoiles, se sont montrés résilients en 2021 avec une baisse toute relative malgré une longue période de fermeture. L’hôtellerie haut de gamme a beaucoup plus souffert, notamment en raison de l’absence de la clientèle liée à l’événementiel et aux congrès. Nous espérons un redémarrage en 2022.

Pascal Savary : Le tourisme en régions est un élément important de l’économie locale. Par exemple, nous travaillons actuellement sur un repositionnement du site historique du Club Med à Vittel. Tous les acteurs publics sont très investis car ce projet aura des impacts significatifs au niveau du territoire sur l’emploi, la formation… Cette dimension est moins prégnante en région parisienne. De plus, les régions ont des atouts spécifiques à faire valoir auprès de la clientèle internationale comme l’œnotourisme à Bordeaux entre autres.

Carlo Tamanini : Des villes comme Bordeaux, Nantes, Toulouse ou Montpellier ont su attirer sur leurs territoires de nouveaux habitants et de nouvelles entreprises au cours des quinze dernières années. Par ruissellement, cette dynamique a été bénéfique pour le tourisme et a amené un profond renouvellement de l’offre hôtelière. Notre projet d’hôtel 4 étoiles Sheraton Bordeaux Airport by Marriott dans la zone d’activités tertiaires de l’aéroport Bordeaux-Mérignac illustre cette tendance. Il aurait été inimaginable il y a quelques années alors qu’il répond aujourd’hui à la demande d’une clientèle dont les attentes ont évolué.

Pascal Savary : La crise sanitaire a évidemment impacté l’hôtellerie mais elle a également amplifié le mouvement de transformation vers une offre complètement centrée sur le client. Ce dernier a envie de retrouver de la chaleur humaine, de l’empathie, du confort après ces derniers mois de distanciation sociale. L’hôtellerie doit apporter des réponses à travers la qualité de son personnel, son offre de services, son design…

Carlo Tamanini : Les clients ont en effet besoin de liens humains et l’hôtellerie va incarner cette nouvelle donne en montant en gamme et en travaillant l’expérience client. Cette tendance correspond par ailleurs à une évolution vitale sur le plan économique : une amélioration de l’offre va redonner de la capacité financière aux hôteliers alors que leur trésorerie et leurs résultats ont été impactés très négativement par la crise sanitaire.

Pascal Savary : Le rapport qualité-prix sera déterminant pour rester attractif. En parallèle, les acteurs de l’hôtellerie devront innover et surprendre, notamment au niveau du design. Atream va s’associer pour créer une nouvelle chaîne d’hôtels dans cette logique. Point important, les nouveaux concepts qui seront développés devront être déployés partout, pas uniquement dans les grandes métropoles. Le tout en absorbant la hausse des coûts des matériaux, de l’énergie… L’équation sera complexe mais pas impossible à résoudre.

Carlo Tamanini : Nous n’en sommes qu’aux prémices de la transformation de l’hôtellerie. Cette dernière va devoir diversifier ses usages et élargir son offre, développer de nouveaux services. Récemment, j’ai moi-même expérimenté les limites du modèle traditionnel : alors que j’avais besoin de travailler deux heures en visioconférence, un établissement n’avait que son espace de petit déjeuner à m’offrir, preuve que l’hôtellier n’a pas encore intégré ce type d’usages et la prestation de services qui l’accompagne ! Les acteurs comme Nexity doivent accompagner cette évolution en développant des outils qui permettront aux hôteliers de répondre à un large spectre de clientèles et d’usages, notamment les personnes qui séjourneront 24h au sein de l’établissement en utilisant leur chambre, mais surtout en profitant des aménités dont doivent s’enrichir les espaces communs. L’emplacement n’est définitivement plus le seul facteur qui compte au moment de choisir un hôtel, l'expérience est désormais tout aussi importante.

Pascal Savary : Les hôtels vont se transformer en véritables lieux de vie grâce à l’hybridation entre l’hospitality, le coliving, le coworking… Et la réversibilité des espaces sera de plus en plus courante. Le marché hôtelier en régions a donc un bel avenir devant lui.

Carlo Tamanini : Il est inconcevable de dormir au bureau mais travailler et vivre dans un hôtel apparait comme logique. Ce dernier va ainsi devenir le pivot entre le bureau et le logement. Par ailleurs, un certain nombre d’établissements en régions sont en souffrance car en voie d’obsolescence. Les évolutions décrites précédemment constituent une formidable opportunité de moderniser ces lieux en leur donnant un rôle dans la vie des gens à la mesure de leur attractivité.